Cet article couvrira :
Introduction
À la fin de l'article précédent sur le vent, nous avons présenté la circulation globale des vents autour du globe. Pour chaque hémisphère, cette circulation définit trois zones :
Équatorial : 0 à 30° : chaud et humide, caractérisé par une basse pression (dépression équatoriale).
latitude moyenne : 30 à 60° : Cellule de Ferrel
polaire : 60 à 90° ; froid et sec, caractérisé par une haute pression (haute pression polaire)
Les régions équatoriales et polaires présentent des conditions météorologiques très spécifiques et ne sont pas abordées ici.
Les latitudes moyennes sont régies par la cellule de Ferrel. Cette région, prise en sandwich entre de l'air froid et sec et de l'air chaud et humide, est un lieu d'échanges de chaleur et de formation des systèmes météorologiques les plus importants. C'est également là que vit la majeure partie de la population mondiale, et nous nous concentrerons sur le climat des latitudes moyennes dans cet article.
Source : https://www.grit.com/
1. Échanges de chaleur aux latitudes moyennes
Dans l'hémisphère Nord, la partie septentrionale de la cellule de Ferrel est très dynamique et concentre une grande partie des phénomènes météorologiques. Aux alentours de 60° Nord, on trouve une ligne imaginaire appelée front polaire. De part et d'autre de cette ligne, les conditions météorologiques sont très différentes.
Côté nord : vent froid d'est
Côté sud : vent d'ouest plus chaud
Ces deux masses d'air très différentes doivent se mélanger. Ce mélange s'effectue symboliquement par de grands ventilateurs poussant l'air chaud vers le nord et l'air froid vers le sud. Le grand ventilateur tournant dans le sens inverse des aiguilles d'une montre représente les dépressions atmosphériques que les marins rencontrent aux latitudes moyennes (par exemple, lors de la traversée de l'Atlantique Nord entre les États-Unis et l'Europe, ou lors du Vendée Globe, pendant le contournement de l'Antarctique).
Cet article s'attachera à expliquer les mécanismes de ces dépressions et comment certaines d'entre elles se transforment en tempêtes puissantes.
Mais avant cela, faisons une brève présentation de ce qu'est un front météorologique dans la section suivante.
2. Fronts
Le schéma ci-dessus illustre deux masses d'air distinctes de part et d'autre du front polaire à 60° Nord. Des symboles météorologiques permettent d'identifier facilement la masse d'air chaude et la masse d'air froide, ainsi que leur mouvement.
A: Fronts froids
L'air froid remplace l'air chaud. Le triangle bleu indique la direction du déplacement du front.
B : Fronts chauds
L'air chaud remplace l'air froid. Le demi-cercle rouge indique la direction du déplacement du front.
C : Frontaux occlus
Un front occlus se forme lorsqu'un front froid se déplaçant plus rapidement rattrape un front chaud se déplaçant plus lentement, provoquant le soulèvement de l'air chaud entre deux masses d'air plus froides. Ce processus entraîne un mélange des couches d'air et engendre généralement des phénomènes météorologiques complexes tels que la formation de nuages, des pluies continues, voire des orages. Après le passage du front occlus, le temps se stabilise souvent et s'éclaircit.
D : Fronts stationnaires
Un front stationnaire, comme son nom l'indique, ne se déplace pas. Les symboles utilisés combinent les fronts froid et chaud. Indépendamment de ces deux fronts, l'air froid se situe de l'autre côté du triangle, et l'air chaud du côté des demi-cercles.
3. Cyclogenèse en surface
Comme indiqué dans la première partie, la dépression/grande zone de basse pression ressentie par les navigateurs naviguant aux latitudes moyennes est responsable du mélange d'air froid et d'air chaud au niveau du front polaire. Les navigateurs ressentent une dépression caractérisée par une chute de la pression atmosphérique, souvent accompagnée de précipitations et de vents violents.
Cette section explique les mécanismes physiques de la formation de ces dépressions. Le lecteur peut approfondir le sujet en consultant le document suivant : https://pressbooks-dev.oer.hawaii.edu/atmo/chapter/chapter-13-extratropical-cyclones/
La cyclogenèse comporte 5 étapes.
Étape 1 : Au niveau du front polaire, aux alentours de 60° Nord, l’air froid au nord et l’air chaud au sud sont séparés par un front stationnaire. Il s’agit de la phase initiale ou d’équilibre.
source : https://slcc.pressbooks.pub/
Étape 2 : la formation d'une onde frontale
Une perturbation survient, perturbant cet équilibre et poussant l'air froid vers le sud et l'air chaud vers le nord.
Étape 3 : un cyclone nouvellement formé
Étape 4 : Cyclone mature, formation d’un front occlus et d’un point triple
Le front froid rattrape le front chaud.
Étape 5 : Phase de dissipation
Le modèle ci-dessus décrit ce qui se passe en surface. L'air converge au centre de la dépression et s'élève, à la manière d'une cheminée. Cependant, cet air ascendant doit trouver des conditions favorables en haute altitude pour poursuivre son ascension et s'évacuer. On peut comparer ce phénomène à un feu de cheminée : la cheminée doit faciliter la montée de l'air, sinon le feu s'étouffe.
Nous aborderons ensuite, dans le chapitre suivant, un niveau supérieur, afin de déterminer quelles sont les conditions favorables à l'intensification d'une dépression et à sa transformation en une puissante tempête.
Pour les lecteurs de l'hémisphère sud, les images ci-dessus peuvent prêter à confusion, car les systèmes de basse pression tournent dans le sens horaire dans cette région. Afin d'éviter tout mal de cou, nous avons inversé et combiné les images ci-dessous.
4. Cyclogenèse au niveau supérieur
À un niveau supérieur, nous utilisons la hauteur géopotentielle plutôt que les isobares. Ces cartes sont légèrement différentes ; les creux et les crêtes représentent les zones basses et hautes.
A. Auges
Une zone de basse pression est appelée creux barométrique. Les lecteurs de cartes météorologiques connaissent généralement le système dépressionnaire, représenté par un cercle fermé d'isobares. Un creux barométrique est une zone allongée de basse pression atmosphérique, sans contour isobarique fermé. On peut l'imaginer comme une vallée.
Source : https://www.e-education.psu.edu/
L'image ci-dessus représente deux choses :
Une zone de basse pression définie, où se trouve la lettre L, avec une isobare fermée.
Une dépression avec des isobares non fermées. L'axe de la dépression est représenté par une ligne pointillée.
Image : les lignes de pression peuvent être visualisées comme l’altitude sur une carte de sentier. Si vous randonnez vers le nord en suivant la ligne de creux, vous descendrez une vallée, entouré de reliefs de part et d’autre.
B. Crêtes
Une crête est associée à une haute pression. Il s'agit d'une zone allongée de pression atmosphérique plus élevée, sans isobare fermé. On peut l'imaginer comme une colline.
L'image ci-dessus représente deux choses :
Une zone de haute pression bien définie, où la lettre H est représentée, avec une isobare fermée.
Une crête avec des isobares non fermées. L'axe de la crête est représenté par une ligne en zigzag.
Image : Si vous randonnez sur la crête vers le sud, vous gravirez une montagne bordée de falaises des deux côtés.
C. Creux et crêtes combinés : configurations des vagues
Les creux et les crêtes ne se produisent pas isolément. Ils se produisent l'un à côté de l'autre et se combinent d'une manière ou d'une autre pour former une figure ondulée.
La configuration des vagues montre clairement un mélange d'air, comme celui des grands ventilateurs dont nous avons parlé dans la première partie.
À gauche du creux, l'air froid venant du nord est poussé vers le sud, en direction d'air plus chaud.
À droite du creux, l'air plus chaud venant du sud est poussé vers le nord, en direction de l'air plus froid.
Les crêtes anticycloniques sont associées à de l'air chaud, à une haute pression en altitude et à une atmosphère plus stable. Il en résulte généralement un temps sec et ensoleillé sous la crête.
Le creux barométrique est associé à un temps frais et dégradé, et la crête à un temps chaud et doux, comme illustré ci-dessous.
Source : https://opensnow.com/
D. Creux et crêtes de niveau supérieur à 500 mbar
Les creux et les crêtes se manifestent aussi bien en surface qu'en altitude. Ceux situés en haute altitude sont à l'origine des régimes météorologiques mondiaux, qui, à leur tour, influencent les phénomènes au niveau du sol.
Les prévisionnistes sont comme des détectives (voir la série « The Rookie » 😀) et ils utilisent la moyenne atmosphère (500 hPa, soit environ 5 kilomètres d'altitude) pour trouver des indices sur la formation des orages en surface. Les orages se forment lorsque l'air s'élève (voir le cours 3 sur les nuages). Le prévisionniste consulte donc la carte géopotentielle à 500 hPa pour repérer les zones d'ascension de l'air. On peut se demander comment une carte météorologique peut indiquer ces zones d'ascension.
L'air ascendant se produit aux points de convergence des masses d'air, ce qui arrive lorsque l'air tourne dans le sens inverse des aiguilles d'une montre dans l'hémisphère Nord. Ce phénomène de rotation est appelé vorticité positive. En résumé, les prévisionnistes n'ont qu'à repérer les zones de vorticité positive pour déterminer où les tempêtes se développeront.
Source : https://www.weather.gov/
Plus d'informations sur Weather.gov - Notions de base sur la vorticité
La vorticité se produit en raison des 3 éléments suivants :
Vorticité de courbure (le vent tourne dans le sens antihoraire)
Vorticité de cisaillement (augmentation du vent à partir des basses couches)
Vorticité terrestre (mouvement du sud vers le nord)
Source : NOAA
La théorie présentée ci-dessus est complexe, mais peut être simplifiée. La zone de vorticité positive maximale se situe en amont du creux (zone bleue ci-dessous). Il s'agit de la zone critique qui requiert une attention particulière. L'arrière du creux présente également une vorticité, mais moindre et donc moins importante (zone orange ci-dessous).
Ci-dessous figure un exemple de géopotentiel réel de 500 mbar.
Nous avons ajouté ci-dessous, sur la même carte, les zones situées en avant du creux barométrique où des tempêtes/dépressions se formeront.
E. Courants-jets polaires à 300 mbar
Les orages se forment là où l'air s'élève, comme illustré précédemment. L'air monte jusqu'à un certain point (la limite supérieure de la troposphère, à 10 kilomètres d'altitude, qui constitue une barrière infranchissable). L'air doit alors être évacué pour que l'ascension verticale puisse se poursuivre et que la dépression puisse se renforcer. C'est donc dans la haute atmosphère (300 hPa / 9 kilomètres d'altitude) que le prévisionniste recherche des signes de divergence des courants d'air, conditions idéales pour le développement des orages.
Les courants-jets se forment là où le vent souffle très fort, à plus de 200 nœuds. Les zones d'entrée droite et de sortie gauche de ces courants-jets correspondent à des régions où les vents en altitude divergent, permettant à l'air en dessous de s'élever. Ces deux zones sont indiquées en rouge ci-dessous.
Source : Wetterzentrale
Vous trouverez plus d'informations sur : https://skepticalscience.com/print.php?n=1967
5. Cyclogenèse en 3 dimensions
Si l'on combine tous les éléments précédents, voici comment une dépression peut se transformer en une violente tempête :
Basse pression en surface avec structure de front froid/chaud
Une zone de basse pression en surface devrait se situer verticalement au-dessus d'une zone de forte vorticité positive à mi-niveau (500 mb), qui correspond au front du creux barométrique.
Une zone de basse pression en surface devrait se situer à l'extrémité droite du courant-jet.






















